Chapitre VIII
De la fenêtre de sa chambre, au premier étage du repaire d’acier, Morane regardait Lansky et ses hommes disparaître au loin, à la limite de la zone désertique. Quand ils se furent enfoncés parmi la végétation, il ne les aperçut plus. Alors, il se redressa et passa dans le couloir. L’heure de l’action était venue pour lui. Il lui fallait sans retard gagner le wharf et s’emparer du cotre qui y était amarré. Quand il aurait atteint les États-Unis, l’affaire regarderait les autorités, et celles-ci se chargeraient bien de réduire le professeur Sixte à l’impuissance.
Au passage, Bob s’arrêta devant la porte du biologiste et colla l’oreille contre le battant métallique, clos de l’intérieur. Aucun bruit ne lui parvint car, peu de temps auparavant, il avait administré au professeur Sixte une solide dose de sédatif en lieu et place de l’atébrine destinée à combattre la fièvre. Pour l’instant, Sixte devait dormir profondément. Personne ne pourrait donc empêcher Morane de mettre son plan à exécution.
Sans se presser, Bob gagna le rez-de-chaussée et sortit sur l’esplanade bétonnée. Longuement, il inspecta les environs, mais sans y déceler nulle présence humaine. Rien ne bougeait sur la zone attaquée par le virus et, là-bas, le long du wharf, personne ne se manifestait.
Mi-courant, mi-marchant, Bob se mit à descendre vers la mer. Le sol, calciné maintenant par le soleil, se soulevait sous ses pas en une poussière rougeâtre pouvant révéler sa présence de loin. Pourtant, il n’avait guère le choix.
Il lui fallait atteindre le wharf au plus vite, et il ne pouvait rien contre cette poussière.
La route fut longue, sous le soleil torride, dont les rayons tombaient à pic, lourds et cuisants comme de l’or fondu. La poussière, délayée par la sueur coulant le long du front de Morane, pénétrait dans ses yeux et l’aveuglait. Elle lui montait dans le nez et la bouche et le forçait à tousser, lui donnant ainsi un petit aperçu de ce que serait la vie sur un monde revu et corrigé par le professeur Sixte.
Quand il fut à une centaine de mètres de la plage, devant laquelle les troncs morts des cocotiers formaient une sorte de grille gigantesque, Morane s’arrêta, s’accroupit derrière un monticule et, une fois encore, inspecta le terrain s’étendant devant lui. Au bord même de la mer, il remarqua quelques gros blocs de coraux. S’il parvenait à les atteindre sans encombres, il pourrait, de là, surveiller le wharf à son aise et se rendre compte de façon certaine si le cotre était gardé ou non.
À demi courbé, les yeux fixés sur la longue ligne du wharf s’avançant vers la mer, Bob fila vers la plage. Une fois encore, il s’arrêta derrière le tronc mort d’un cocotier. Il lui restait une étroite bande de sable volcanique à franchir avant d’atteindre les blocs de coraux. À nouveau, il jeta un regard circonspect autour de lui car, il le savait, un coup de feu pouvait à tout moment venir mettre fin à son équipée. Comme rien ne bougeait, il s’enhardit et se mit à progresser lentement, sur les genoux et sur les mains, à travers le sable. Il allait atteindre les blocs de coraux lorsque, derrière l’un d’eux, quelque chose bougea, puis un homme se dressa, braquant un pistolet automatique Colt de gros calibre. Une voix dit :
— Vous marchez donc à quatre pattes à présent, comme un chien, monsieur Semenof !…
L’homme se trouvait à contre-jour et Morane, ébloui par le soleil, ne pouvait discerner ses traits. Pourtant, au son de la voix, il avait reconnu Mayer. Celui-ci, d’un mouvement de tête au-dessus de son épaule, désigna le wharf.
— Vous vouliez nous fausser compagnie, n’est-ce pas ? dit-il encore. Voilà pourquoi vous rampiez comme un Sioux.
À pas comptés, le meurtrier avança vers Bob, pour s’immobiliser à deux mètres de lui.
— Jamais je n’ai eu confiance en vous, monsieur Semenof, fit encore Mayer. Avant, je ne savais pas exactement quel jeu vous jouiez, mais à présent, je le soupçonne…
Il éclata de rire, et les tambours vaudous, qui battaient au loin, faisaient à ce rire un étrange fond sonore.
— Votre jeu, quel qu’il soit, s’arrête ici. Cette fois, je ne vous laisserai plus la chance de vous en tirer, et le Professeur n’est pas là pour vous protéger… Allons, redressez-vous. En vous tuant dans cette position, j’aurais l’impression de tuer un animal, et c’est un homme que je veux tuer en vous. Jamais meurtre ne m’aura causé autant de plaisir…
Bob comprit n’avoir aucun quartier à attendre de la part de Mayer. Celui-ci l’assassinerait plus par haine que pour toute autre raison. Lentement, Morane se redressa les poings serrés.
Mayer avança d’un pas encore, tenant son revolver contre la hanche. Il allait tirer. Et, soudain, les deux poings de Morane s’ouvrirent en se détendant, envoyant deux poignées de sable au visage de Mayer. Aveuglé par les minuscules particules de lave, Mayer poussa un cri de douleur et pressa aussitôt la détente. Mais, déjà, Bob s’était dérobé. Sa main droite saisit le poignet du forban, le tordit en une classique passe de jiu-jitsu, obligeant Mayer à lâcher son arme.
Une terrible lutte corps à corps s’engagea entre les deux hommes. Morane combattait avec toute sa force et son énergie, mais la haine décuplait la vigueur de Mayer. Peu à peu, cependant, plus adroit et plus puissant, Morane prenait le dessus. Il avait acculé le forban aux blocs de coraux et, de ses deux poings, lui administrait une magistrale correction. Cependant, renversé sur l’un des blocs, Mayer referma la main sur un fragment de corail et en frappa Bob à la mâchoire. Le morceau de corail, faisant masse, décupla la force du coup et Bob recula, avec un bruit de gong dans les oreilles. Un second coup l’atteignit. Un voile rouge descendit devant ses yeux et il tomba en arrière dans le sable.
Quand il voulut se redresser, il était trop tard. Mayer avait récupéré l’automatique et l’en menaçait à nouveau. Cette fois, Bob savait que c’était fini. Sa brillante carrière s’arrêtait là. Le doigt de Mayer se crispa sur la détente de l’arme. Un coup de feu déchira le silence. Mayer, frappé comme par une masse, sursauta, sa bouche se tordit et il tomba en avant vers Morane, les bras étendus, comme s’il voulait encore, en un dernier sursaut de haine, saisir son adversaire. Puis il ne bougea plus…
À une vingtaine de mètres derrière le corps de Mayer, entre celui-ci et la haie de cocotiers morts, une jeep était arrêtée. Tout près, Saunders, le garde du corps du professeur Sixte, se dressait, un revolver fumant à la main. Saunders ne portait pas ses lunettes solaires et un franc sourire brillait dans ses yeux.
— Il me semble, commandant Morane, que je suis arrivé au bon moment…
Bob sursauta, et son visage se durcit. L’Américain se mit à rire. Il avait abaissé son arme et ne semblait animé d’aucune intention mauvaise à l’égard de son interlocuteur.
— Ne soyez pas étonné, dit-il encore. Quand je vous ai vu poser le pied sur le wharf, l’autre jour, j’ai tout de suite su que vous n’étiez pas Semenof…
Il tendit à Bob une petite photo, enfermée dans un médaillon d’apparence ancienne. La photo elle-même semblait jaunie par le temps et représentait un homme brun, au teint pâle et aux yeux brillants.
— On dirait un portrait de famille, n’est-ce pas, commandant Morane ? Pourtant, c’est celui du vrai Semenof.
Morane rendit le médaillon à l’Américain, puis demanda :
— Peut-on savoir dans quel camp vous êtes exactement ?
Saunders sourit ironiquement.
— Dans le vôtre, commandant Morane, dit-il, dans le vôtre… Mais, avant de vous raconter mon histoire, laissez-moi d’abord me présenter sous mon vrai nom : Fred Duncan, du Service de Contre-Espionnage des États-Unis.
*
* *
À présent, Morane et Fred Duncan, alias Saunders, étaient assis dans la jeep, et celle-ci avait été garée en dehors de la zone dévastée, à l’abri d’un boqueteau de palmiers nains.
— Voilà un peu plus de deux ans, expliquait Duncan, le professeur Sixte se mit en contact avec Semenof et le professeur Laine, afin d’obtenir, à n’importe quel prix, leur collaboration. Mais Laine, sans connaître le but de Sixte, avait assez fréquenté celui-ci pour savoir de quoi il pouvait être capable. Aussi s’empressa-t-il de repousser les offres qui lui étaient faites. Semenof, lui, feignit d’accepter mais, en même temps, par l’intermédiaire de notre ambassade à Paris, il se mettait en rapport avec les services secrets américains. Ceux-ci connaissaient Sixte comme industriel. Il pouvait donc paraître normal qu’il voulût engager deux techniciens de valeur. Cependant le fait que ces techniciens étaient également des experts en fusées, et aussi le mystère dont Sixte entourait les négociations éveilla l’attention des services secrets. On demanda donc à Semenof de demeurer en rapport avec Sixte. En même temps, on décida d’introduire un observateur dans l’entourage direct du Professeur, et je fus aussitôt choisi pour cette besogne. Comme Sixte cherchait un garde du corps, je m’arrangeai pour être choisi et gagner sa confiance. Voilà six mois, Sixte me fit venir dans cette île où, malgré tous mes efforts, je ne parvins pas à réunir grand-chose sur ses travaux. Le Professeur est biologiste et les biologistes se livrent la plupart du temps à une foule d’expériences ne menaçant en rien la paix du monde.
» Je commençais à désespérer de ne jamais rien découvrir qui puisse intéresser mes chefs, quand Sixte m’annonça l’arrivée de Semenof. Cette nouvelle m’étonna, car il avait été convenu avec Semenof que celui-ci gagnerait, à la dernière minute, les États-Unis, où il se mettrait aussitôt sous la protection des autorités.
» Cependant, quand je vins vous accueillir sur la plage je sus aussitôt que vous n’étiez pas Semenof, dont je possédais à tout hasard une photo adroitement camouflée. Mieux, je vous reconnus. Mon métier m’oblige en effet à avoir la mémoire des visages et comme, pendant la guerre je travaillais pour l’O.S.S., en Angleterre, je me souvins de vos traits. Dès la fin des hostilités, vous vous en souvenez sans doute, tous les journaux britanniques publièrent, avec votre photo, le récit circonstancié de vos exploits. Robert Morane, le plus jeune commandant de la Royal Air Force ! L’homme aux cinquante-trois victoires aériennes ! Ah ! vous aviez la cote d’amour à l’époque, et on parla beaucoup alors d’une blessure que vous aviez reçue à la tempe. Un éclat de flak. Les chirurgiens anglais sont habiles et n’ont pas leurs pareils pour vous recoudre un homme. Pourtant, la cicatrice est là – Duncan pointait l’index vers le front de Bob – très effacée peut-être, mais visible. Il ne m’en fallut guère davantage pour me renseigner sur votre identité…
» Vous connaissez la suite. Le Professeur réalisant sa première grande expérience ; la révolte des travailleurs ; la maladie du Professeur ; le départ de Lansky et de ses hommes. Mayer était sans doute demeuré en arrière pour vous surveiller, et cela par haine personnelle. Moi-même, renseigné désormais sur les buts criminels de Sixte, j’étais descendu vers la mer pour me rendre compte une nouvelle fois s’il n’existait pas un moyen de fuir. Nos chemins se sont croisés, et je suis arrivé juste à temps pour vous tirer des griffes de Mayer… »
À son tour, Bob mit, en quelques mots, son compagnon au courant des événements qui l’avaient mené dans l’île Assomption. Il lui révéla aussi de façon précise les plans du professeur Sixte et l’existence des virus S. 12 et S. 13. Duncan fit la grimace.
— Une fichue combine, dit-il, et qu’il nous faut flanquer par terre sans tarder…
Morane hocha la tête.
— Avant tout, fit-il, nous devons partir d’ici…
— Avez-vous un plan quelconque ?
Le bras de Morane se tendit entre les palmes, en direction du wharf.
— Nous allons tenter de nous emparer du petit cotre et faire voile vers la prochaine île. De là, vous pourrez joindre Washington. Cependant, il peut y avoir un pépin…
— Lequel donc ?
Bob désigna le Sea Witch, toujours ancré dans la rade.
— De là-bas, dit-il, on a pu apercevoir ma petite corrida avec Mayer, et cela pourrait nous amener de sérieux ennuis.
Mais Duncan secoua la tête.
— Rien à craindre de ce côté, du moins pour l’instant. L’équipage du yacht est parti le long de la plage, en direction du sud de l’île, afin de prêter main forte à Lansky et à ses hommes. Quelques marins doivent seulement être demeurés à bord et, avec ce soleil, ils sont sans doute en train de couler la vie douce, allongés dans leurs hamacs.
Morane prit le colt de Mayer, qu’il avait récupéré, et s’assura de son bon fonctionnement. Il eut un léger sourire à l’adresse de Duncan, puis dit :
— Allons-y… Cap sur le wharf, et espérons que le cotre sera en état de prendre la mer…
L’Américain mit le moteur en marche et la jeep, écartant les palmes, fila sur la sable dur, le long de la plage. Arrivé à hauteur du wharf, Duncan freina et les deux hommes, sautant à terre, s’avancèrent sur les planches. Personne, sur le cotre, ne donnait signe de vie. Rapidement, ils s’en approchèrent. Alors, ils aperçurent un homme allongé à l’ombre du cockpit. C’était un garde. Il dormait, sa carabine posée près de lui sur le pont. Revolver au poing, Bob enjamba le bordage et, en deux pas, fut près du dormeur. Celui-ci ne bougeait toujours pas. Bob se baissa, ramassa la carabine puis, le revolver braqué, cria :
— Vous êtes arrivé, mon vieux…
Le garde sursauta et, instinctivement, tendit la main pour atteindre son arme, mais sa main racla seulement les planches du pont. En même temps, il aperçut le revolver de Bob et ses yeux s’agrandirent de frayeur.
— Ne craignez rien, fit Morane. On ne vous fera aucun mal… si vous vous tenez tranquille.
Quelques minutes plus tard, l’homme se trouvait solidement ligoté à l’aide de vieux cordages, bâillonné et allongé sur le wharf, à l’ombre d’un monceau de vieilles barriques.
Fred Duncan désigna alors le mât du cotre.
— J’espère que vous y connaissez quelque chose, dit-il à l’adresse de Bob. Personnellement, j’appartiens à l’époque de la navigation à moteur…
Morane se mit à rire doucement.
— Soyez sans crainte, dit-il, ce rafiot doit avoir un moteur auxiliaire. Occupez-vous-en. Pendant ce temps, je m’occuperai des voiles…
Cinq minutes plus tard, le cotre se trouvait prêt à prendre le large. Pourtant, au moment de larguer les amarres, Morane sursauta. Une crainte lui était venue subitement, et il se rendit compte qu’il ne pouvait se résoudre à quitter l’île avant de s’en être affranchi.
Duncan s’était aperçu de son hésitation.
— Qu’avez-vous, mon vieux ? interrogea-t-il. Quelque chose qui ne tourne pas rond ?…
— Peut-être, répondit Bob avec une moue perplexe. Avez-vous imaginé ce qui se passera quand Sixte s’apercevra de notre fuite ?
— Il entrera sans doute dans une violente colère, et ce sera tout…
Mais Morane eut un geste de dénégation.
— Non, ce ne sera pas tout, fit-il. Ou bien il détruira toutes les preuves pouvant l’accabler, et notre parole ne pèsera rien auprès de la sienne – il est immensément riche, ne l’oublions pas – puis il ira établir ailleurs sa base d’expérience. Il ne manque pas d’atolls dans le Pacifique qui n’attendent qu’un acquéreur. D’autre part, aussitôt notre fuite constatée, le Professeur pourra quitter l’île et disparaître pour aller répandre son virus un peu partout. Cela prendrait sans doute beaucoup plus de temps qu’en opérant par fusée et le virus S. 12, transporté en quantités moins massives, mettrait plus longtemps à s’étendre. Pourtant, finalement le mal serait le même, et l’on se trouverait totalement impuissant à l’enrayer…
Le visage de l’Américain prit une expression d’intense perplexité.
— Je n’avais guère songé à cela, dit-il. Pourtant, vous avez raison. Mais quelle solution apporter à cela ? Nous ne pouvons quand même pas demeurer ici éternellement à attendre des jours meilleurs. Il y aurait évidemment un bon moyen de tout arranger : régler son compte au professeur Sixte, mais ce serait de toute façon un crime que, ni vous ni moi n’accepterions de commettre…
— Il existe une autre solution, presque aussi définitive, fit Morane. Il suffirait de dérober la formule de culture du Virus S. 13 qui, comme je vous l’ai dit, enraye les effets du S. 12. De cette façon le S. 13 en possession des autorités américaines, la moindre tentative criminelle du professeur Sixte pourrait être immédiatement contrée…
Pendant quelques instants, Duncan demeura pensif, puis finalement il releva la tête.
— Votre solution est excellente, commandant Morane. Pourtant, là aussi il y un pépin. Pour avoir la formule du S.13, il faudrait retourner au repaire.
— J’y monterai, fit Bob. Lansky et ses hommes ne seront pas de retour avant plusieurs heures. Le professeur est donc seul, et il dort.
Mais l’Américain secoua la tête.
— Non, dit-il, ce sera moi qui irai chercher cette formule. Je suis ici en service commandé, ne l’oubliez pas. Mon pays me paye pour risquer ma peau…
Un sourire railleur apparut sur les traits durs de Morane.
— Savez-vous ce que c’est qu’un bouillon de culture ? demanda-t-il.
Duncan parut surpris, puis dit :
— Si je sais ce que c’est qu’un bouillon de culture ? Bien sûr que je le sais… C’est un truc qui, que…
Le sourire de Morane se changea en un petit rire.
— Bien sûr, je le pensais bien, railla-t-il. Un truc qui, que… Vous ne seriez sans doute pas capable de reconnaître la formule de préparation du Virus S. 13 de celle de la fameuse confiture aux abricots de la cousine Sarah… De mon côté, je possède une certaine formation scientifique, et voilà pourquoi je suis tout désigné pour retourner au repaire…
— Pourquoi n’y remonterions-nous pas ensemble ?
— Parce que, en cas de coup dur, nous pourrions avoir besoin de filer immédiatement. Vous devez demeurer ici pour surveiller le cotre et mettre en marche le moteur… Tout ce que vous pouvez faire, c’est m’indiquer où je pourrais trouver, à votre avis, la formule S. 13.
En signe d’impuissance, Duncan leva les bras et les laissa retomber le long de son corps.
— Vos raisons sont meilleures que les miennes, dit-il. Je dois donc m’incliner. Le professeur range ses dossiers dans le laboratoire. Une armoire métallique marquée d’un triple 0. Elle doit être fermée à clé. Je ne puis rien vous dire d’autre…
Morane eut un petit geste d’insouciance.
— Je réussirai bien à m’expliquer victorieusement avec l’armoire, dit-il. Pour le reste, je m’en remets à ma chance proverbiale…
Du doigt, il désigna la carabine du garde.
— Prenez cela, mon vieux, dit-il à Duncan et, si quelqu’un vient vous demander des comptes, n’hésitez pas à vous en servir.
— Soyez sans crainte… Quand il le faut, j’ai la détente facile…
« Heureusement pour moi, songea Bob, car sans cela le copain Mayer n’aurait pas manqué de m’envoyer de l’autre côté de la grande barrière… »
Il eut un léger signe de la main à l’adresse de Duncan puis il regagna la plage, grimpa dans la jeep et la lança à flanc de colline, en direction du refuge d’acier.